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Du côté des étudiants étrangers – Dijoncter.info - Site d'infos en lutte sur Dijon
Nous assistons ces derniers temps à une intensification des mesures visant l'expulsion des personnes résidant en France sans papiers. Cette amplification de la répression a été boostée par une énième loi sur l'immigration (loi Hor...
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Du côté des étudiants étrangers Publié le 07/01/2008 | Mise à jour le 05/02/2024 Nous assistons ces derniers temps à une intensification des mesures visant l’expulsion des personnes résidant en France sans papiers. Cette amplification de la répression a été boostée par une énième loi sur l’immigration (loi Hortefeux), qui durcit considérablement les conditions de séjour des étrangers en France. En plus de l’augmentation des démarches administratives imposées aux étrangers, les autorités se sont fixé des objectifs quantifiables concernant leur expulsion. Ainsi, il a été décidé que 25 000 personnes devaient être expulsées en 2007, logique qui réduit par là-même la vie humaine à un chiffre, froid. Cette course au chiffre a également amplifié la suspicion envers les étrangers et leur stigmatisation. Ce sont des flics parisiens qui se font passer pour des CPE pour convoquer des parents et les arrêter ; des étudiants dijonnais qui se font arrêter chez eux en période d’examens ; des rafles à la sortie des écoles, des gares, des marchés et des interpellations au faciès. On ne compte plus les dénonciations des fonctionnaires de mairie lors des mariages mixtes, comme à Firminy où un algérien s’est fait expulser quelques jours avant son mariage. Ce sont les Roms qui sont violemment reconduits en Roumanie, collectivement, sans aucune considération de la condition humaine et du droit. C’est également un concierge dijonnais qui appelle les policiers pour dénoncer trois sans-papiers. Ce sont des thésards obligés de se cacher pour pouvoir terminer leur thèse avant d’être expulsés. La situation dans laquelle sont placées les personnes étrangères les entraîne à des décisions dramatiques : à Dijon, une femme a tenté de mettre fin à ses jours après avoir reçu une Obligation à Quitter le Territoire Français ( OQTF ) ; une de ses amies, bien qu’enceinte, a entamé une grève de la faim en soutien. Ailleurs ce sont des personnes qui se défenestrent lorsque la police vient les arrêter. Ces actes sonnent comme un cri de désespoir face à une réalité de plus en plus barbare. Les lois Sarkozy et Hortefeux instaurent une nouvelle logique de sélection : les étrangers lambda ne sont plus les bienvenus en France et ceux qui y sont déjà doivent la quitter. Ces lois ont poursuivi le durcissement du droit des étrangers qui a débuté dans les années 1980. Depuis cette époque, on se dirige vers toujours plus de fichage, de surveillance, de contrôle et de suspicion, à l’échelle nationale mais également européenne. L’autre est considéré comme potentiellement dangereux, d’où ces politiques sécuritaires. Mais ces lois ont opéré une rupture dans la logique sous-jacente au droit des étrangers. Sarkozy a introduit la notion d’« immigration choisie » qui s’oppose à celle d’« immigration subie » et Hortefeux des éléments de droit du sang (test ADN ). Selon le concept d’« immigration choisie », la France ne devrait accepter sur son territoire que les étrangers utiles à son économie et à son rayonnement. L’étranger n’est donc vu que comme travailleur, force de travail, niant l’Homme qu’est l’étranger, le dépersonnalisant, en faisant une chose rentable pour une économie. L’immigration n’est abordée que sous un angle économique, et non pas social, culturel, humain. Cette volonté de sélection des travailleurs se retrouve également au niveau des étudiants. Depuis 2005, la France a mis en place des structures de sélection dans un nombre croissant de pays : les Centres d’Études pour la France ( CEF ). Pour s’inscrire dans une université française, l’étudiant doit obligatoirement passer par ces centres. Les CEF vérifient le niveau de langue, le sérieux du projet d’études, la motivation de l’étudiant. Ce dernier doit également passer un entretien payant. Ainsi s’opèrent une sélection financière et une sélection concernant les études que souhaite faire la personne. Un des objectifs est de recruter une élite étrangère, de choisir les étudiants que la France veut accueillir. Cette évolution des règles régissant l’accueil et le séjour des étrangers, étudiants, travailleurs ou autres, reflète une évolution plus générale de la société dans laquelle nous vivons. Une société de plus en plus fermée, se méfiant des personnes considérées comme n’étant pas dans la norme, une société dans laquelle les gens doivent être rentables (tout comme les filières universitaires doivent l’être ou mourir) et efficaces, une société de plus en plus individualiste où la solidarité n’a plus guère de place. Ce système de sélection a ses cadres, son fonctionnement. La mise en rétention obligatoire des étrangers avant leur expulsion. Les arrestations à la sortie du bus ou de l’école suivies d’un séjour de plusieurs heures dans un commissariat. Les arrestations « au faciès » pour plus d’efficacité. Les jugements expéditifs. Mais ce système a aussi un fonctionnement interne, beaucoup moins visible, et qui touche tous les étrangers, même les plus protégés par la loi. Il faut avoir vu ce qu’est le guichet de l’immigration de la préfecture de Côte d’Or. Il faut aller s’adresser aux personnes qui travaillent derrière pour comprendre ce que c’est que d’être étranger en France. Le guichet de l’immigration, c’est deux heures d’attente dans une salle exiguë, une tension permanente, la non-confidentialité assurée pour qui veut se faire entendre, l’assurance de revenir le lendemain « parce qu’aujourd’hui on a pas eu le temps »… Et nous, vous croyez qu’on a que ça à faire ? Il est utile, pour comprendre l’humanisme préfectoral, de se pencher pour s’adresser à un guichetier et de ne pas se trouver désarçonné par ce morceau de vitre qui obstrue volontairement la vue du demandeur et qui l’oblige à se tordre dans des poses dont aucune n’est confortable. Mais ce ne sont encore là que choses matérielles qui si elles se limitaient à elles-mêmes n’auraient que peu d’influence sur l’obtention des papiers. Ce dont on ne peut être témoin qu’en ayant eu à renouveler ses papiers, c’est le cynisme avec lequel on demande des comptes à l’étranger. De nombreux soupçons sont portés sur les personnes. Que ce soit n’importe quel guichet, il faut justifier, démontrer, prouver, ré-expliquer et assurer de sa volonté, de sa bonne foi, de sa certitude et de sa détermination à obtenir tel ou tel papier. Papier qui servira lui même à obtenir l’approbation de telle personne nécessaire à la démarche administrative en cours. Le temps de recours contre la décision du préfet est court : un mois pour réagir à une décision aussi brutale, faire face à ce système. C’est d’autant plus court que l’enjeu est de taille. Il s’agit de trouver en un mois les ressorts qui laisseront la vie à ces personnes. Parce que la vie est autre chose que manger et boire, parce que c’est aussi des amis, des habitudes, une activité et des loisirs ; l’expulsion c’est autre chose qu’un retour au pays : c’est la fin d’une vie. En parallèle à cette situation et à ces drames, s’est organisée une résistance contre ces lois et les pratiques qu’elles impliquent. Différents collectifs et associations se sont formés à travers l’hexagone et mènent des actions de soutien, de solidarité et d’accompagnement aux personnes en difficulté administrative. Ainsi un véritable travail de terrain est accompli, par des collectifs comme RESF [ 1 ] ou RUSF [ 2 ] , au côté des personnes en difficulté afin de parer à l’aléa et l’arbitraire administratif. Des manifestations plus médiatiques sont également organisées pour faire connaître cette lutte et sensibiliser le grand public : ainsi le 20 octobre, des manifestations furent organisées dans plusieurs villes suite à l’appel de plusieurs associations et collectifs. À Dijon, plus de 500 personnes ont manifesté contre les politiques migratoires actuelles. Plusieurs rues ont alors été renommées du nom de personnes expulsées ou victimes de cette politique migratoire. Ainsi la rue de la Liberté a pris le nom de M me Chunlan Liu, chinoise sans-papiers de 51 ans qui s’est défenestrée jeudi 20 septembre et qui est morte le lendemain. La rue de la Préfecture se nomme maintenant rue Elanchelvan, du nom d’un opposant tamoul assassiné par l’armée sri-lankaise au petit matin après s’être vu refuser le droit d’asile en France. La journée du 24 octobre fut également l’occasion d’une médiatisation des luttes menées contre ces différentes lois lors de la journée nationale « université sans papiers ». À Dijon, cette journée fut caractérisée par diverses actions menées par le RUSF21 . La journée a commencé par l’accrochage, sur les troncs de l’arbre situé au patio de la cafétéria du bâtiment droit-lettres, de silhouettes symbolisant des étudiants victimes des lois migratoires en cours. Ces silhouettes marquent une présence symbolique de tous ces étudiants expulsés et permettent de rappeler que sous nos yeux se déroulent et se dérouleront encore des tragédies humaines. Durant toute la journée, des tables de presses ont été organisées dans les différents bâtiments de l’Université de Bourgogne dans le but de sensibiliser et de débattre sur la question de la liberté de circulation des personnes. Cette journée fut clôturée par une conférence-débat de Maître Clémang, avocate spécialiste du droit des étrangers et présidente de la Ligue des Droits de l’Homme à Dijon. Cette conférence a réuni plus de 80 personnes d’horizons différents (étudiants étrangers ou pas, professeurs, militants, etc.), et a permis d’apporter des précisions sur les nouvelles lois et mesures qui touchent les étrangers. Il demeure néanmoins que ces luttes et résistances ont des limites. Dans de nombreux cas, on sent une impuissance face à la machine bureaucratique et administrative froide et inhumaine. Ces luttes consistent souvent en la défense de personnes et se font dans l’urgence. Cette pratique n’est pas pleinement satisfaisante du fait que la bataille s’opère sur le terrain des législateurs, en utilisant les arguments aberrants de ces derniers, les risques étant de créer une catégorie de bons migrants, pour laquelle on va pouvoir mobiliser du monde, et une autre catégorie de mauvais·es migrant·e·s dont la situation est plus désespérée. Face à l’évolution des lois et des pratiques, il est évident que d’autres moyens d’action doivent être trouvés et pratiqués. Le combat doit aussi se mener plus globalement sur le principe même qui régit ces lois : la restriction de la liberté de circulation des individus. Malgré ces limites, il est i...